une expérience de dingue (hs#13: METALLICA, Welcome Home (Sanitarium))

A force de danser la danse de la pluie (voir le précédent hs), arriva ce qui devait arriver : sirène, blouses blanches, camisole, piqûre qui fait du bien… Zou, direction l’asile pour le bLoug dans ce headbanging science #13 !

L’occasion d’écouter en boucle le Welcome Home (Sanitarium) de Metallica, ici dans une vidéo de 1988 (Hammersmith Odeon, Londres) :

Welcome Home (Sanitarium) est tiré de Master of Puppets, troisième album des Four horsemen sorti en 1986. Le morceau s’inspire directement du film Vol au-dessus d’un nid de coucou (One Flew Over the Cuckoo’s Nest, 1975), le chef-d’oeuvre de Miloš Forman interprété par Jack Nicholson (le film est lui-même adapté d’un roman de l’Américain Ken Kesey (paru en 1962), par ailleurs figure de proue défoncée au LSD du mouvement psychédélique des années 1960.

Les paroles ainsi que l’accélération du tempo de Welcome Home collent parfaitement à la problématique de Vol au-dessus d’un nid de coucou : un homme sain d’esprit mais traité comme fou (“Just labeled mentally deranged”) finit par être broyé par le système inhumain, rigide et brutal qui régit l’établissement où il s’est volontairement fait interner. James Hetfield, frontman de Metallica, chante:

They think our heads are in their hands
But violent use brings violent plans
Keep him tied, it makes him well
He’s getting better, can’t you tell ?

Welcome Home, Jack

 

Vol au-dessus d’un nid de coucou se déroule au début des années 60. Vaste temps de remise en cause et de réforme du système psychiatrique en Amérique du Nord et en Europe: humanisation du soin aux personne souffrant de troubles mentaux (politique de désinstitutionnalisation), abandon progressif de la pratique de la lobotomie (qui « soigne » définitivement Jack Nicholson dans le film, de façon beaucoup moins marrante que celle des Ramones), essor de l’antipsychiatrie, mouvement qui remet en cause la notion même de maladie mentale…

A la sortie du film, le petit monde de la psychiatrie est encore ébranlé par une expérience restée célèbre: l’expérience de Rosenhan. Les résultats de cette enquête sur la validité du diagnostic psychiatrique, menée par le psychologue David Rosenhan, sont publiés en janvier 1973 dans Science sous le titre de On Being Sane In Insane Places (« Un individu sain dans des lieux qui ne le sont pas », un sous titre idoine au Welcome Home de Metallica ou au Vol au-dessus d’un nid de coucou).

 

Voici l’expérience résumée (l’article original est disponible en ligne). Elle s’est faite en deux temps.

Episode 1 : cachez ces sains que nous ne saurions voir

  • 8 faux patients se présentent pour être admis en hopital psychiatriques (dont Rosenhan lui-même) ; leurs profils sont variés, ceux des hôpitaux également
  • ils prétendent entendre des voix (les mots « vide », « creux » et « bruit sourd » (« thud » ; l’expérience est aussi connue sous le nom de « thud experiment ») ; ils ne simulent aucun autre symptôme
  • ils sont admis sans difficulté

 

j'entends des voix (James Hetfield, Metallica, dans sa prime jeunesse)

  • ils se comportent ensuite normalement et annoncent au personnel soignant ne plus avoir d’hallucinations auditives – ils se comportent tellement normalement, qu’ils prennent des notes !
  • le personnel médical ne les considère pas sains d’esprit – au contraire de certains vrais patients, qui leur reprochent d’être des journalistes ou des chercheurs
  • 7 sur 8 sont diagnostiqués schizophrènes malgré leur comportement tout à fait normal, amical et coopératif
  • ils ne peuvent sortir qu’après avoir reconnu être schizophrènes et accepté de prendre un traitement pour guérir (2100 pilules en tout, qu’ils firent semblant de prendre, et de nature disparate d’un établissement à l’autre alors que les diagnostics étaient identiques…)
  • bilan : entre 7 et 52 jours d’enfermement pour une pathologie inexistante (19 en moyenne)

S'enthousiasmer pour du baseball est-il réellement preuve de sanité ?

 

Episode 2 : « Ca ne va pas être possible »

Un hôpital psychiatrique, doutant des résultats, se fit fort de détecter à coup sûr de faux patients que Rosenhan enverrait sur une période de 3 mois. Averti de l’expérience, le personnel de l’hôpital démasqua 41 imposteurs certains parmi les 193 admis dans l’établissement sur la période. Problème, Rosenhal n’avait envoyé absolument AUCUN faux-patient !

D’où l’on conclut qu’un certain nombre d’individus qu’il aurait mieux valu admettre et soigner repartirent avec leur pathologie sous le bras…

 

En conclusion de son expérience, Rosenhan critiqua la validité du diagnostic psychiatrique, instrument révélateur de son propre environnement mais ne disant rien du patient – par conséquent inefficace à distinguer le sain du fou. Il mettait également l’accent sur la dépersonnalisation et la nature dégradante des soins apportés aux patients – soins découlant mécaniquement d’une « étiquette » indécollable, celle du diagnostic. En quelque sorte, le diagnostic créait la pathologie.

It is clear that we cannot distinguish the sane from the insane in psychiatric hospitals. The hospital itself imposes a special environment in which the meaning of behavior can easily be misunderstood. The consequences to patients hospitalized in such an environment – the powerlessness, depersonalization, segregation, mortification, and self-labeling – seem undoubtedly counter-therapeutic.

 

Une pinte de bon sang : critique de la critique

Pour spectaculaire qu’elle soit, la portée de l’expérience de Rosenhan doit être relativisée.

Le psychiatre Robert Spitzer fut le premier à monter au créneau. Dans un article publié en 1975 (consultable ici), il pointait du doigt la méthode employée : en quoi simuler pour fausser un diagnostic invalidait-il le principe même du diagnostic ?

Si je devais boire une pinte de sang, puis taisant cela, me précipiter aux urgences de n’importe quel hôpital en vomissant du sang, le diagnostic du personnel serait parfaitement prévisible. S’ils me diagnostiquaient et me traitaient pour un ulcère gastro-duodénal, je doute que je pourrais soutenir de façon convaincante que la science médicale ne sait pas comment diagnostiquer mes symptômes. » [ceci bien sûr dans l'hypothèse où l'on considère qu'on a affaire à un être humain et pas à un vampire...]

D’autres auteurs apportèrent leur lot de commentaires sur les limites de l’expérience de Rosenhan.

Le principal reproche concerne évidement le nombre de cas, bien trop réduit pour pouvoir en généraliser quoi que ce soit : 8 faux patients dans un premier temps, un seul établissement participant dans un second.

D’autres points peuvent être soulevés :

  • Le diagnostic ne cherche pas à trancher entre des catégories sain et non sain, mais à repérer des symptomes de maladie mentale – effectivement présentés par les faux-patients. Le rôle du personnel des hôpitaux n’étant pas de détecter des imposteurs, il n’est pas étonnant que ces derniers ne soient pas démasqués. Tout autre aurait été la portée de l’étude si les faux-patients avaient mal simulé leur symptomes, donnant par là la possibilité d’être démasqués.
  • Le comportement “normal” des faux-patients peut être discuté : en l’occurrence, un comportement véritablement normal consisterait à tomber le masque et déclarer l’imposture.
  • Les faux-patients étant finalement déclarés “en voie de guérison” et aptes à sortir, le personnel médical a bien fini par constater la disparition des symptomes – le temps mis pour arriver à cette constation pose effectivement problème, mais au moins ont-ils échappé au sort de Jack Nicholson dans Vol au-dessus d’un nid de coucou.
  • La seconde étape est doublement biaisée : l’établissement voit des imposteurs partout parce ce qu’il s’attend à ce qu’on lui en envoie et met en place une procédure contre-nature pour les débusquer.

 

Quoi de neuf Docteur ?

Alors, que penser de l’expérience de Rosenhan ? Il ne s’agit certainement pas de la preuve irréfutable d’une faillite générale de la psychiatrie mais simplement d’un coup de projecteur bien senti sur certains de ses effets oppresseurs.

Qu’en serait-il aujourd’hui ? La psychologue Lauren Slater, auteur d’un ouvrage sur les grandes expériences en psychologie du 20e siècle (Opening Skinner’s Box, 2004) s’est amusée à réitérer l’expérience auprès de plusieurs psychiatres – de façon tout aussi biaisée. Grande différence avec les années 70, une prescription lourde (un arsenal d’anti-psychotiques et d’anti-dépresseurs) mais ni hospitalisation ni prise en charge psychothérapeutique. Mais le sens profond ne change pas : le contexte dans lequel le psychiatre se trouve et les approches thérapeutiques de l’époque influencent le diagnostic. En clair : la médication remplace l’enfermement. Slater :

Il est assez clair pour moi que c’est la médication qui dirige les décisions, et pas le contraire. À l’époque de Rosenhan, c’était le schème psychanalytique qui déterminait ce qui allait mal ; de nos jours, c’est le schème pharmacologique, la pilule.

 

Quant à nos amis Jack Nicholson et James Hetfield, ont-ils réellement à se plaindre de leur petit tour au sanitarium ? Le premier semble s’être réinséré et s’être fait une place dans le porte-à-porte :

 

Pour le second, malheureusement, la dose paraît avoir été un peu forte :

 

 

 

Welcome Home (Sanitarium) – Hetfield/Ulrich/Hammett

Welcome to where time stands still
no one leaves and no one will
Moon is full, never seems to change
just labeled mentally deranged
Dream the same thing every night
I see our freedom in my sight
No locked doors, No windows barred
No things to make my brain seem scarred
Sleep my friend and you will see
that dream is my reality
They keep me locked up in this cage
can’t they see it’s why my brain says Rage
Sanitarium, leave me be
Sanitarium, just leave me alone
Build my fear of what’s out there
and cannot breathe the open air
Whisper things into my brain
assuring me that I’m insane
They think our heads are in their hands
but violent use brings violent plans
Keep him tied, it makes him well
he’s getting better, can’t you tell?
No more can they keep us in
Listen, damn it, we will win
They see it right, they see it well
but they think this saves us from our hell
Sanitarium, leave me be
Sanitarium, just leave me alone
Sanitarium, just leave me alone
Fear of living on
natives getting restless now
Mutiny in the air
got some death to do
Mirror stares back hard
Kill, it’s such a friendly word
seems the only way
for reaching out again.

DDT, la rock star des pesticides (hs#10: RAMONES, Teenage lobotomy)

Après l’ambiance subtilement gore du HS#9, soyons plus guillerets – gabba gabba hey ! – grâce aux grands-pères du punk-rock : les Ramones ! Encore que… Teenage Lobotomy aborde en fait un sujet sensible : les pesticides.

headbanging science, la rubrique musicale des titres qui ont (presque) un rapport avec la science : #10 : RAMONES – TEENAGE LOBOTOMY

Écoutons d’abord ce morceau, tiré de leur troisième album studio Rocket to Russia (1977), grâce à cette vidéo vintage d’un concert au Beat Club en 1978. L’échalas Joey Ramone nous y raconte comment il s’est offert une lobotomie gratuite à grands coups de DDT, la star incontestée des insecticides :

 

 

quand le DDT fait pschiit

 

Le dichlorodiphényltrichloroéthane, plus connu sous son petit nom de DDT, est le premier insecticide moderne. Il fait donc partie des pesticides de première génération, issus de l’industrie du chlore (dits organochlorés), aujourd’hui passés de mode et strictement interdits dans de nombreux pays industrialisés. Mais il eut dans l’immédiat après-Seconde Guerre Mondiale un succès… foudroyant.

Développé par l’armée américaine durant le conflit, il fait d’abord ses preuves en Europe, en particulier en Italie où il permet d’éradiquer le typhus — en 1943, des villes entières comme Naples sont aspergées de DDT pour éliminer les poux porteurs de la maladie. Après guerre, il commence d’être massivement utilisé contre le paludisme : 48 pays entament une vaste campagne de lutte sous l’égide de l’Agence Internationale pour le Développement (AID). En parallèle, l’agriculture s’en empare pour un faire fol usage et les ménages en remplissent leurs placards (le DDT est autorisé à la vente dès août 1945 aux USA).

 

L’essor fulgurant du DDT laisse croire au véritable produit miracle. Et pourquoi s’en faire, puisqu’il est sans risque pour l’homme, comme l’affirme ce petit boniment daté de 1946 :

En 1947, Time Magazine pousse le bouchon encore plus loin : le DDT ? C’est bon pour moi !

 

Vraiment sans danger ? On l’espère à voir ces gamins gambader dans un gros nuage d’insecticide. À cette époque, aucun des Ramones n’est encore né, mais ils feront partie d’une génération exposée sans crainte aucune aux bienfaits du DDT :

Si l’éradication complète du paludisme en Europe et en Amérique du Nord doit plus aux mesures d’hygiène du début du XXe siècle et à l’augmentation du niveau de vie, il est vrai qu’ailleurs, au Brésil ou en Égypte, par exemple, ce sont bien les abondantes pulvérisations du pesticide qui vont permettre d’éliminer le fléau. C’est sur l’utilisation du DDT que l’OMS base son programme mondial d’éradication du paludisme, initié en 1955. La campagne est un succès, le taux de mortalité lié au paludisme s’écroule. Mais c’est un succès fragile.

 

le tapage du Printemps silencieux

En 1962, paraît aux États-Unis Printemps silencieux (Silent Spring), ouvrage de la biologiste américaine Rachel Carson, C’est un succès d’édition phénoménal et le début d’une polémique qui va signer le quasi-arrêt de mort du DDT.

Printemps silencieux traite des effets négatifs des pesticides sur l’environnement, et plus particulièrement sur les oiseaux, dont la disparition prive les campagnes de leur chant (d’où le silence du titre). Le livre de Carson fait réellement date. C’est directement ou indirectement dans son sillage que se structure et se développe le mouvement écologiste, qu’est créée l’Agence pour la Protection de l’Environnement (EPA, Environmental Protection Agency) et que les élus américains en arrivent à interdire le DDT en 1972, après de longues palabres au Congrès, devant lequel l’auteure est amenée à témoigner. Les premiers mouvements contre le DDT ont vu le jour à la fin des années 50, mais grâce à la caisse de résonnance de Printemps silencieux, ils changent d’échelle. L’opinion publique est désormais alertée et le DDT sert de catalyseur aux mouvements antichimiques et antipesticides des années 1960, au grand dam d’industriels encore peu préparés à la gestion de crise.

avec des méthodes pareilles, le lobby du pesticide ne va pas tarder à retourner l’opinion contre lui…

 

 

La très forte influence de Printemps silencieux ne pouvait bien sûr que se retourner contre l’ouvrage. Dans la lutte idéologique qui s’organise autour du DDT, le livre de Carson devient un emblème malmené de toutes parts : paré de fausses vertus, affligés de vices inventés. On lui reproche, aujourd’hui encore, d’être le fruit d’une opération de marketing soigneusement élaborée dès avant sa publication et, plus grave, de pratiquer la désinformation en livrant pêle-mêle au public résultats scientifiques (dont certains seront invalidés par la suite, mais c’est là le lot de la science ; faire grief de la qualité de l’ouvrage sur la base de connaissances ultérieures à sa publication procède de la malhonnêteté intellectuelle) ou rapports gouvernementaux et simples témoignages relevant de l’anecdote.

Dans un autre registre, on lui prête également des idées qui n’y figurent pas. Ainsi, Carson ne demande pas l’interdiction ou le retrait total des pesticides, comme le veut la caricature de son propos. Elle plaide pour leur utilisation responsable, y compris pour le DDT, afin de limiter le développement de résistances – une problématique réelle et qui conduit à réduire l’utilisation du DDT bien avant son interdiction. Par ailleurs, ce n’est pas tant l’utilisation de l’insecticide dans la lutte contre le paludisme qui est visée que celle, croissante, qu’en fait l’agriculture, contribuant ainsi à limiter l’efficacité du DDT et partant, celle des campagnes antipaludéennes.

Malgré ses défauts, Printemps silencieux ne campe donc pas sur la position bêtement « écolo-irresponsable » que lui prêtent ses détracteurs. Le livre développe même des idées qui sont toujours d’actualité (voir l’agriculture écologiquement intensive abordée dans le hs #4).

 

 

science de mort

Deux faits sur le paludisme (source OMS) :

  • En 2008, le paludisme a été à l’origine de près d’un million de décès, pour la plupart des enfants africains.
  • Le paludisme est une maladie évitable dont on guérit.

Peut-on pour autant rendre responsable l’interdiction du DDT (dans les pays industrialisés, donc non concernés !) des millions de morts du paludisme en Afrique et ailleurs ? Évidemment non. Logiquement, l’assertion n’a pas de sens, moralement, elle est choquante. Ce genre de rhétorique propesticide et antiécologiste fleurit pourtant encore aujourd’hui un peu partout, jusque dans la prose du techno-médiocre de Michael Crichton dans son roman État d’urgence :

« Depuis l’interdiction, deux millions de personnes par an, principalement des enfants, meurent du paludisme. Cette interdiction a causé plus de cinquante millions de morts inutiles. Interdire le DDT a tué plus de personnes qu’Hitler. »

Carson = Hitler, en résumé. Pourquoi tant de haine ? Et pourquoi cette ambiance aussi délétère autour du DDT ?

pesticides : un peu de douceur dans un monde de brutes

Peut-être est-il mal né, tout simplement. Pur produit de la sérendipité, le DDT a été inventé à la fin du XIXe siècle. Mais c’est un chimiste suisse, Paul Hermann Müller, qui s’est rendu compte de son efficacité. Alors qu’il cherchait à développer un insecticide contre les mites, il s’aperçoit que le DDT tue également les doryphores et dépose un brevet en 1939. Parfaitement neutres, les autorités suisses font connaître la découverte aux Allemands, qui s’en désintéressent (évidemment, un produit qui extermine les doryphores…), et aux Alliés, qui en feront large usage, comme nous l’avons vu. En 1948, Müller reçoit le prix Nobel de médecine « pour sa découverte de la grande efficacité du DDT en tant que poison contre divers arthropodes. »

Voici donc un chimiste nobélisé en médecine. C’est une première. Et un signe inquiétant pour l’autre extrémité du spectre de nos agiDDT, celui de ses farouches adversaires, dont le militantisme, pour stimulant qu’il soit, est tout autant empreint de figures de mort. Écoutons par exemple Jean-Pierre Berlan, agronome et membre du conseil scientifique d’Attac, dans cet entretien à Article 11. Après avoir comparé l’usage des pesticides à celui des drogues dures en raison des effet d’accoutumance et de dépendance qu’il engendre (donnant par là tout à fait raison aux Ramones !), il s’attaque au “projet de mort” porté par les nouvelles formes de pesticides que sont les OGM :

“… l’industrie des pesticides cherche maintenant d’autres formes de pesticides : c’est ainsi qu’elle a inventé les fameux “organismes génétiquement modifiés”. Les OGM, ce sont des plantes pesticides. (…) La logique reste la même, celle de cette industrialisation du vivant menée tambour battant depuis deux siècles. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les firmes produisant les pesticides ont aussi pris le contrôle de l’industrie des semences — donc de la vie. Elles se prétendent “industrielles des sciences de la vie”, pour tromper tout le monde ; mais en réalité elles ne produisent que des produits en -cide (fongicides, insecticides, herbicides…), soit des produits qui tuent. Ce sont donc, en fait, des industries des sciences de la mort. Et elles poursuivent ainsi leur projet mortifère par d’autres moyens, qu’on appelle couramment les OGM.”

 

POP goes the world

Difficile au milieu de discours contradictoires et enfiévrés de faire la part des choses sur le DDT. Essayons d’y voir plus clair.

En 1992, le DDT a été classé avec onze autres pesticides dans la catégorie des POPs lors de la conférence de Rio (avant d’être la cible de la convention de Stockholm du 22 mai 2001 qui vise à les interdire). POP pour Polluants Organiques Persistants, une définition fondée sur quatre critères :

  1. le POP est toxique ;
  2. il s’accumule dans la chaîne alimentaire (ce qui est mesuré par un facteur de bioconcentration) ;
  3. il est persistant dans l’environnement (ce qui est mesuré par la demi-vie, période au-delà de laquelle 50 % du produit s’est dégradé) ;
  4. il voyage sur de longues distances.

 

Le DDT voyage bien : on en a retrouvé dans les neiges de l’Arctique.

Il est sans conteste persistant : sa demi-vie est de 15 ans. Si vous en déversez 50 kg dans votre jardin (admettons que vous êtes facétieux), il vous en restera 25 kg dans 15 ans, 12,5 kg dans 30 ans, etc.

Il est tout à fait bio-cumulatif : parce qu’il se dissout très bien dans la graisse, les animaux qui en absorbent ne parviennent pas à l’éliminer. On en retrouve donc de grandes concentrations chez les animaux du sommet de la chaîne alimentaire (par exemple, nous).

Ces trois premières caractéristiques ne prêtent guère à controverse. Diverses études montre du reste la persistance de traces de DDT dans le corps humain plusieurs décennies après l’arrêt de son utilisation dans les pays industrialisés : ainsi cette étude australienne publiée en septembre 2011, qui révèle sa présence persistante dans le lait maternel, ou cette étude française de l’INVS qui mesure des concentrations de DDT ou de DDE (son métabolite, c’est-à-dire le produit de sa dégradation) plus faibles dans la population française que dans celle de pays voisins, « confirmant ainsi que, du fait de son interdiction, l’exposition au DDT a cessé depuis longtemps en France. »

 

Et alors, c’est grave ? Malheureusement, le critère de la toxicité est lui sujet à de vifs débats et recouvre différentes questions. Parmi ses effets nocifs possibles, l’EPA liste :

  • Probable human carcinogen
  • Damages the liver
  • Temporarily damages the nervous system
  • Reduces reproductive success
  • Can cause liver cancer
  • Damages reproductive system

L’Agence Internationale pour la Recherche sur le Cancer (IARC) classe le DDT dans la catégorie 2B, c’est-à-dire « potentiellement cancérogène pour l’homme » (Possibly carcinogenic to humans)

Faisant fi du principe de précaution, les partisans d’une levée de l’interdiction du DDT tiquent sur tous ces “possible”. Ils ont alors beau jeu de mettre à profit les incertitudes et les contradictions inhérentes aux différentes études médicales sur le sujet, qui échouent (fatalement) à établir un lien direct entre un produit précis et une pathologie multifactorielle. Sur le sujet plus large du lien entre pesticides et cancer, un article de synthèse de 2007 paru dans le Bulletin du Cancer arrive ainsi à cette conclusion ouverte à toutes les interprétations :

« Les données concernant l’association entre cancers et pesticides sont nombreuses mais d’interprétation délicate. »

 

Face à un sujet aussi polémique et confrontée à une urgence sanitaire mondiale bien réelle, l’OMS n’a pas toujours su, on peut le comprendre, sur quel pied danser. Dans un document de 139 pages publié en septembre 2011 sur Dix ans de partenariat et résultats de la lutte contre le paludisme, on est surpris que le DDT soit mentionné en tout et pour tout une seule fois… Une discrétion qui reflète peut-être un léger malaise. D’abord DDT-phile dans la lutte antivectorielle (ie l’écrabouillage des moustiques), l’OMS fut ensuite taxée de céder aux pressions écologistes en prônant une lutte antipaludique ouvertement DDT-phobe. En 2006, elle parut encore tourner casaque et revenir sur 30 ans de bannissement injuste en réévaluant sa politique à l’égard du DDT, déclarant que son utilisation à l’intérieur des habitations était sans danger pour la santé.

Retour à la raison ? C’est une lecture simpliste et partisane, qui oublie qu’en réalité, le DDT n’a jamais été interdit pour la lutte contre le paludisme dans les pays tropicaux. Il y était tout simplement moins efficace en épandages massifs, en raison du cycle de vie permanent des moustiques et du développement parallèle des résistances. La pulvérisation à l’intérieur des habitations ainsi que l’utilisation de moustiquaires imprégnées d’insecticides, les deux formes de lutte antivectorielle préconisées aujourd’hui signifient donc moins un retour en grâce du tout-DDT que la formalisation d’une utilisation circonstanciée et raisonnée… Un peu ce que prônait Carson, donc…

 

Ramones lobotomy

L’interdiction du DDT aux États-Unis dans les années 1970 ne doit pas qu’à la dynamique impulsée par Printemps silencieux. À cette époque, le pygargue à tête blanche, qui se trouvait menacé d’extinction, joua également un rôle significatif. Le quoi ? Le pygargue à tête blanche, ou bald eagle, ce rapace emblématique des États-Unis :

“j’ai encore un pygargue dans la moquette, ramenez-moi du DDT !”

… et par ailleurs emblème des Ramones, utilisé par le groupe à de nombreuses reprises, comme sur l’hilarant single Ramones Aid, ovni de leur discographie sorti en 1986 :

 

Écolos les Ramones ? Pas franchement, même s’ils utilisèrent le thème du DDT dans une autre chanson, I Wanna Be Well. Et même pas politiques du tout, contrairement à ce que voudrait la vulgate punk-rock. La faute à des divergences profondes entre les membres du groupe et notamment entre Joey Ramone, le chanteur, et Johnny Ramone, le guitariste.

Johnny “lobotomy” Ramone

Teenage lobotomy ? Plus qu’au pygargue, c’est à Johnny que devait secrètement penser Joey en entonnant ce morceau. Ultra conservateur, antisémite, opposé à l’avortement et au mariage des gays, membre de la National Rifle Association, fan de Ronald Reagan, son président préféré (!), Johnny Ramone avait effectivement l’air d’avoir subi les dommages collatéraux d’une trop forte exposition au DDT…

 

 

Teenage Lobotomy – written by Joey Ramone, Johnny Ramone, Dee Dee Ramone, Tommy Ramone

 

Lobotomy, lobotomy, lobotomy, lobotomy!
DDT did a job on me
Now I am a real sickie
Guess I’ll have to break the news
That I got no mind to lose
All the girls are in love with me
I’m a teenage lobotomy

 

Slugs and snails are after me
DDT keeps me happy
Now I guess I’ll have to tell ‘em
That I got no cerebellum
Gonna get my Ph.D.
I’m a teenage lobotomy

 

Lobotomy, lobotomy, lobotomy, lobotomy!
DDT did a job on me
Now I am a real sickie
Guess I’ll have to break the news
That I got no mind to lose
All the girls are in love with me
I’m a teenage lobotomy

 

 

 

Lobotomy, lobotomy, lobotomy, lobotomy!
DDT did a job on me
Now I am a real sickie
Guess I’ll have to break the news
That I got no mind to lose
All the girls are in love with me
I’m a teenage lobotomy

Slugs and snails are after me
DDT keeps me happy
Now I guess I’ll have to tell ‘em
That I got no cerebellum
Gonna get my Ph.D.
I’m a teenage lobotomy

Lobotomy, lobotomy, lobotomy, lobotomy!
DDT did a job on me
Now I am a real sickie
Guess I’ll have to break the news
That I got no mind to lose
All the girls are in love with me
I’m a teenage lobotomy

“Teenage Lobotomy” as written by Joey Ramone, Johnny Ramone, Dee Dee Ramone, Tommy Ramone

quelques menus problèmes de peau (hs#9 : SLAYER, Dead Skin Mask)

C’est la rentrée, le bLoug est prêt à utiliser la terreur pour que vous l’ayez dans la peau : Welcome to Plainfield, Wisconsin, en compagnie d’Ed Gein, le boucher du Wisconsin, suavement hurlé par Slayer dans Dead Skin Mask. Et si ça ne suffit pas, on rajoutera des bactéries dévoreuses de chair !

headbanging science (la rubrique musicale des titres qui ont (presque) un rapport avec la science) : #9 : SLAYER – DEAD SKIN MASK


Tirée du Unholy Alliance Tour, tournée annuelle nord-américaine et européenne ayant Slayer pour tête d’affiche (et à laquelle a participé Mastodon, notre précédent HS), cette vidéo de Dead Skin Mask vous invite à vêtir vos plus beaux atours nécrophiles. Ce classique du combo de Huntington est paru en 1990 sur l’album Seasons in the Abyss, prétendant au titre de meilleur album du groupe. Pas de clip rigolo cette fois-ci, mais peu importe : Slayer à l’étrange talent de sonner mieux live qu’en studio, une rareté pour un groupe de thrash.

Marketé stupidement groupe le plus violent du monde, Slayer est un habitué des controverses en raison, notamment, de thématiques pas franchement consensuelles : satanisme, religion, guerre et Holocauste… Le groupe aurait même été mis à profit pas l’US Army en Iraq pour tenter d’effrayer les troupes de Saddam Hussein – ou essayer de les rendre sourdes ? Ici, point de tintouin, nous sommes dans le doux domaine de la décoration d’intérieur… Enfin, pas n’importe laquelle. Celle, très particulière de Ed Gein, aka “le boucher de Plainfield”, un des tueurs en série les plus marquants de l’histoire des Etats-Unis… Pas forcément pour de bonnes raisons.

La maison des horreurs, 50 ans avant l’invention de Damidot

Plainfield, Wisconsin. 640 habitants. Une sorte de désert rural boisé et plat comme une limande (dont le bLoug vous a appris qu’elles pouvaient être meurtrières) émaillé de granges sinistres aux allures de nids de serial killers. Le 16 novembre 1957, jour de l’ouverture de la chasse au cerf, disparaît Bernice Worden, 58 ans, boutiquière de son état. Les policiers trouvent du sang sur le sol de son magasin ainsi qu’une cartouche vide et constatent l’absence de la caisse enregistreuse. Sur le comptoir, une facture pour de l’antigel, au nom d’Edward Gein.

Edward Theodore Gein, né le 27 août 1906 à La Crosse, non loin de Plainfield, est une sorte de vieux garçon solitaire un peu étrange mais gentil (on lui confie du baby-sitting…). Il est aussitôt arrêté, d’abord pour vol. La police se rend dans sa ferme, située sur un terrain isolé de 80 hectares entouré de bois et de champs. A l’intérieur, il fait sombre, la nuit est tombée et la ferme ne possède pas l’électricité. La police découvre des pièces impeccablement rangées – en réalité sanctuarisées en hommage à sa défunte mère -, à l’exception de la cuisine et de la chambre de Gein, remplies d’un invraisemblable bric-à-brac pourrissant et empestant, interdisant presque que l’on s’y déplace.

la cuisine d’Ed Gein, un sens très particulier de l’ordre

En inspectant la cuisine avec sa lampe torche, le shérif découvre, pendue à l’envers à une poutre, une carcasse décapitée, éventrée et vidée. Pas vraiment celle d’un cerf. Il vient de retrouver Bernice Worden. Du moins une partie.

ceci n’est pas un cerf

Plus de moyens (générateur et lampes à arc) permirent ensuite à la police de faire la lumière les lieux. L’inventaire macabre de leurs découvertes est des plus singuliers. Bernice Worden retrouva sa tête (la police trouva également celle, desséchée, de Mary Hogan, la première victime officielle de Gein, disparue trois ans plus tôt), mais aussi son coeur, dans un sac plastique, et ses entrailles, recouvertes par un vieux costume. D’autres trophées, plus anciens et appartenant manifestement à d’autres victimes, complétaient la déco très tendance des lieux :

  • un haut de crâne faisant office de bol,
  • des abat-jours et une corbeille à papiers en peau humaine,
  • un fauteuil lui aussi en peau humaine,
  • un lit décoré avec des crânes,
  • neuf sexes de femmes décorés dans une boîte à chaussures,
  • une ceinture faite de mamelons,
  • des masques de peau remplis de chiffons pour figurer des têtes réduites,
  • quatre nez,
  • deux vagins “frais”
  • un squelette enterré dans le jardin
  • un costume entier en peau humaine, équipé de jambières de seins et d’un sexe féminin.

En un temps (heureux) où M6 D&co et autres consternants massacres d’intérieur n’existaient pas, le tableau était choquant. La demeure, intitulée la “maison des horreurs”, va faire les gros titres de Time et de Life. L’Amérique des années 50 va se passionner pour ce cas intrigant. Gein avouera le meurtre des deux femmes précitées ainsi que la mutilation de plusieurs cadavres, également féminins, déterrés dans le cimetière local. Il fut déclaré irresponsable de ses actes et interné dans un hôpital psychiatrique du Wisconsin.

Même pas un serial killer, encore moins un serial queer

Techniquement parlant, Gein n’est pas un tueur en série puisqu’il ne fut reconnu coupable que de deux meurtres – il est toutefois probable qu’il en ait d’autres à son actif, à commencer par celui de son frère aîné Henry, qui s’opposait à la vénération de Ed pour leur mère tyrannique, Augusta, et qui fut retrouvé mort en 1944 dans des circonstances mystérieuses.

Médicalement parlant, bien que “la goule de Plainfield” soit devenue un des cas les plus documentés de l’histoire criminelle, sa description est généralement erronée. En cause, la médiatisation très forte au moment des faits, puis le passage à la postérité à travers les oeuvres cinématographiques qu’il inspira, au premier rang desquelles Psychose, d’Alfred Hitchcock, à travers le personnage de Norman Bates, et Le silence des agneaux de Jonathan Demme, via celui de Buffalo Bill (Leatherface de Massacre à la tronçonneuse étant pour sa part un cousin plus lointain).

 

la maison Bates, cousine de celle de Gein ; Psychose est basé sur un livre de Robert Bloch qui prend quelques largesses avec les faits

 La revue Jump Cut, qui analyse les médias sous l’angle de la représentation des classes, des races ou des genres, a publié en 2000 un article qui décortique de façon très documentée les contresens du cas Gein. Le texte cherche à combattre les préjugés qui poussent à placer le signe égal entre homosexualité /  travestissement / transsexualisme et psychopathologie meurtrière (le personnage de Buffalo Bill étant l’aboutissement outrancier de ce préjugé là où Norman Bates restait plus introverti). Au-delà de ce militantisme, il montre comment la postérité réduisit à tort Gein à un travesti nécrophile (voire cannibale).

Parmi les déformations imputables à l’emballement médiatique de l’époque, la déclaration à la presse du procureur Earl Kileen spéculant que le corps de Bernice Worden avait été mutilé et que son cœur avait été découvert dans une casserole sur le poêle firent pour longtemps de Gein un cannibale (cette inexactitude est présente sur de très nombreux sites qui lui sont consacrés ; on y trouve aussi mention d’un frigo alors que la ferme n’avait pas l’électricité). Le magazine Life claironna pour sa part que Gein voulait devenir une femme. Ceci seulement deux semaines après son arrestation, soit avant que tout profil psychologique ait été officiellement établi. Les auteurs qui écrivirent ensuite sur lui relayèrent le pseudo désir qu’avait Gein de changer de sexe et de devenir une femme ; ils extrapolèrent à partir de faits inexacts. Les interrogatoires menés par la police allèrent un peu vite en besogne et furent certainement pour beaucoup à l’origine de ces mésinterprétations sur les désordres sexuels de Gein. Les retranscriptions montrent en effet que celui-ci, fortement influençable et éprouvant des difficultés à dissocier ce dont il se souvenait et ce qu’on lui rapportait, se livrait à une sorte de ni oui ni non involontaire, apportant des réponses qui allaient dans le sens de ce qu’on lui suggérait.

Ed Gein, le vrai

son alter ego cinématographique du Silence des agneaux

Pour l’article de Jump Cut, les projections des fantasmes de l’époque sont probablement à l’oeuvre dans ces interprétations hâtives. En cette fin des années 1950, la catégorie nouvelle du “psychopathe sexuel” se cristallise dans la société et Gein est du pain bénit pour les profileurs de tous poils. Travestissement et transsexualisme sont également des sujets chauds pour la justice et la psychiatrie de cette époque. Plus largement, la société américaine s’interroge alors fortement sur l’homosexualité et sur le rôle de la mère dans cette « déviance » : trop ou pas assez d’affection pour son rejeton pouvait en faire un inverti efféminé. De façon caractéristique, le rôle d’Augusta Gein, une absurde grenouille de bénitier profondément misandre est constamment mis en valeur dans la littérature sur Gein – il est vrai que son cas est particulièrement gratiné. Mais comme le pointe l’article, jamais aucun mot sur l’absence du père, bon à rien décédé tôt et totalement méprisé par Augusta.

Même aujourd’hui, le cas Gein reste semble-t-il délicat à diagnostiquer, tant fiction et faits sont enchevêtrés. Les interprétation freudiennes à base de complexe d’Œdipe qui aurait poussé Gein à vouloir changer de sexe pour résoudre son conflit avec sa mère adorée furent promptement balayées. Le “boucher fou” fut diagnostiqué comme un schizophrène présentant des symptômes aigus de travestissement, de fétichisme et de nécrophilie. Les expertises psychiatriques actuelles valident la schizophrénie mais certainement pas la nécrophilie. Gein nia du reste toute activité sexuelle avec les cadavres dont il détestait l’odeur. Aucun rapport récent ne le décrit non plus comme un travesti.

Quelle que fut sa pathologie, c’est bien tranquillement que Edward Gein mourut, en 1984, à l’âge de 78 ans, au Mendota Mental Health Institute (Wisconsin), l’institut de gériatrie où il avait été placé 6 ans auparavant. Il y coulait de jours heureux, véritable patient modèle… dont la seule bizarrerie était de regarder fixement les infirmières… Cause du décès ; insuffisance respiratoire. Pas de chance, a cette date, Tom Araya, chanteur et bassiste de Slayer, ex-thérapeute respiratoire, avait cessé ses activités médicales et englouti ses maigres économies dans l’autofinancement du premier album du groupe. Faute de secourir Gein, nul doute qu’il aurait aimé faire la causette avec lui, le thème des tueurs en séries étant sa marotte et un sujet d’inspiration pour ses textes (on pourrait aussi lui conseiller le cas Efren Saldivar : soupçonné d’au moins 50 meurtres, ce thérapeute respiratoire (!) californien fut surnommé Angel of Death… par ailleurs titre d’un des classiques de Slayer qui fait référence à Joseph Mengele… histoire de boucler la boucle des coïncidences du petit monde des atrocités, il se trouve que celles commises par les nazis dans les camps inspirèrent Gein, friand lecteur ; il eut peut-être à lire l’histoire de Ilse Koch, “la chienne de Buchenwald”, qui fut traduite devant un tribunal militaire américain à Dachau le 11 avril 1947 ; parmi les pièces à conviction : trois morceaux de peau tatouée ayant fait office d’abat-jour et une tête réduite…).

Dead skin arm

Le problème des histoires d’horreur c’est qu’on a toujours un peu peur, malgré soi, qu’elles nous arrivent en réalité, si fantastiques soient-elles. C’est sans doute ce que doit méditer Jeff Hanneman, cofondateur et guitariste de Slayer, plongé véritablement dans ce qui pourrait être une des chansons cauchemardesques du groupe. Son titre : Dead Skin Arm. Sans éprouver forcément beaucoup de sympathie pour Hanneman (pas innocent dans la mauvaise image du groupe en raison d’un goût douteux pour la Wehrmacht illustré par les noms consternants donnés à ses chiens : Prussia et Rommel), il est difficile de ne pas compatir à l’épreuve qu’il traverse depuis février 2011 : le voilà dévoré par des bactéries “mangeuses de chair” !

quoi fasciste ? mais puisque je vous dis que… ah fasciite… merde, c’est quoi ce truc ?

 

Fasciite nécrosante. C’est le petit nom de la maladie heureusement rare qui frappe le guitariste au bras droit. Il s’agit d’une infection rare de la peau et des tissus sous cutanés, se propageant le long des fascia (tissu qui enveloppe les muscles et les organes). Les origines de l’infection sont diverses. Elle peut provenir d’une plaie très banale. Dans le cas de Hanneman, une morsure d’araignée est évoquée. C’est probablement erroné, le diagnostic de la fasciite se révélant difficile, les araignées sont souvent mises en causes à tort. Les bactéries responsables de l’infection sont variées et souvent multiples, mais le streptocoque du groupe A (Streptococcus pyogenes) est souvent relevé. L’appellation de « bactéries mangeuses de chair », qui fit florès dans la presse à une époque, est usurpée : ces bactéries ne se nourrissent pas de la chair, mais libèrent des toxines mortelles pour les cellules vivantes conduisant à la nécrose.

Si vous présentez les symptômes suivants, inquiétez-vous :

  • Douleurs
  • Fièvre inexpliquée
  • Gonflement
  • Œdème dur et légèrement douloureux
  • Coloration rouge sombre et élévation de l’épiderme

Car ce qui arrive ensuite est particulièrement douloureux, rapide, et assez souvent mortel :

Rapidement, on assiste à la constitution de bulles remplies d’un liquide bleu tirant sur le violet. Par la suite, la peau devient fragile et prend une couleur tirant sur le bleu, puis sur le marron ou le noir. Dans un deuxième temps, l’infection est susceptible d’atteindre les aponévroses profondes (membranes fibreuses qui enveloppent les muscles en les séparant les uns des autres). Elle finit par donner une coloration gris foncé à la peau de la partie atteinte. A ce stade avancé, les patients présentent des signes toxiques et de choc qui traduisent une insuffisance de fonctionnement de plusieurs organes. Le choc, appelé également sepsis, correspond à une inflammation généralisée de tout l’organisme, et se traduit par une défaillance de tous les viscères qui n’assurent plus leur rôle normalement. (source : vulgaris-medical.com

Si vous tenez vraiment à voir les effets d’une fasciite nécrosante équipez-vous d’un sac à vomi et cliquez ici : Dead skin mask pour de vrai.

Le traitement est lourd et forcément médical et chirurgical : débridement de la peau (large incision pratiquée dans la zone infectée ; les médecins ont ouvert le bras de Jeff Hanneman du poignet à l’épaule), ablation des tissus nécrosés (morts), antibiothérapie, éventuellement oxygénothérapie,  greffes de peau (Hanneman y a eu le droit aussi).

 Tom Araya a déclaré que Slayer n’entrerait pas en studio tant que Hanneman ne serait pas rétabli à 100%. Rien ne dit que cela arrivera un jour. Le groupe avait jusqu’alors résisté aux tracas médicaux. En 2010, ce sont les cervicales de Araya qui lâchaient. Remède : une plaque en métal dans le cou. Et plus question de headbanger sur scène pour le chanteur-bassiste dont c’était la marque de fabrique… Un comble que Araya ait les honneurs de la rubrique headbanging science du bLoug finalement… Slayer, le groupe le plus violent du monde ? Pff, des mauviettes oui.

 

Pour tous vos problèmes de peau, une seule adresse : slayer.net

 

Dead Skin Mask – Lyrics: Araya | Music: Hanneman

Graze the skin with my finger tips
The brush of dead cold flesh pacifies the means
Provocative images delicate features so smooth
A pleasant fragrance in the light of the moon
CHORUS
Dance with the dead in my dreams
Listen to their hallowed screams
The dead have taken my soul
Temptation’s lost all control
Simple smiles elude psychotic eyes
Lose all mind control rationale declines
Empty eyes enslave the creations
Of placid faces and lifeless pageants
In the depths of a mind insane
Fantasy and reality are the same
Graze the skin with my finger tips
The brush of dead warm flesh pacifies the means
Incised members ornaments on my being
Adulating the skin before me
Simple smiles elude psychotic eyes
Lose all mind control rationale declines
Empty eyes enslave the creations
Of placid faces and lifeless pageants
CHORUS